Déhiscence
De mes doigts s’envole l’oiseau que deux mains autrefois réunies dessinaient en ombre chinoise.
Fragile respiration ailée, murmure incandescent au soir des visages qui résonnent.
Aucune trace.
Juste un passage.
L’oiseau sautille et s’en va déjà tandis que je plonge un à un les doryphores dans l’eau pleurée des anciens rois, lorsque s’agenouillaient encore leurs sujets de feuilles et de bois.
Chaque pierre écoutait la mélopée d’un lointain retour ; chaque fleur faisait la révérence aux dernières lueurs qui donnaient à leur pétales la transparence des paupières des nourrissons.
Dans chaque veine, la sève.
Dans chaque chemin, mes pas.
Aux immortelles saveurs s’accorde le printemps.
Les hortensias gonflent leurs poumons depuis que l’oiseau ne tourne plus en cage thoracique, allégés des soupirs et des silences.
Je suis fleurie de la migration poétique des âmes lentes.
















Rhizome
À la surface grise frissonnent les errances du soleil tandis qu’en son abyme des méduses ensommeillées flottent en un ciel de mer.
Temps suspendu, temps rouillé, pour ces danseuses aux cheveux sévères tressant leurs couleurs à nos yeux autrefois pétrifiés, et que seule une heureuse lumière peut réveiller.
Leurs larmes bénissent cette eau, abondant sanglot consolé où plonge l’origine d’une promesse ressuscitée.
Le crépuscule prépare son envol avec une joie singulière avant de s’écumer vers d’autres rivages où s’enfoncent d’autres pieds.
Lorsque la mer aura pleuré notre corps
Lorsque le sel aura creusé notre cœur
Il restera la trace de nos vies sur une peau de papier.
Il restera ce rhizome en terre par lequel nous sommes tous liés, ces racines profondes qui prolifèrent en synapses fleuries.
Chemins entrelacés et arbitraires des rencontres qui ne s’oublient.
Il restera le nid de nos espoirs, la transparence de nos esprits, tout ce en quoi nous voulons croire et tout ce qui s’est accompli.
Premier pas, première fleur, advenus d’un sol déployé où mûriront les fruits du mystère en un bois fissuré.
Au dernier soir d’une autre déhiscence, nous embrasserons les coulures de sève nourricière jaillissant d’anciennes béances.
Nous nous envelopperons du voile des millénaires pour aller dormir sous un ciel sans étoile et une lune médusée de nous voir revenir exactement là où tout a commencé.
Clarisse









Les larmes des méduses






















